mercredi 25 février 2015

L'Union européenne est une prison,la Bastille en était une aussi ...

L'Union européenne est une prison,la Bastille en était une aussi ...



Dans une contribution publiée en annexe de cet article,Kostas Lapavitsas intervient comme militant et membre de la direction de Syriza.
Les questions qu'il pose sont celles que discutent aujourd'hui tous les militants de Syriza et au delà tous les travailleurs grecs.
Il convient pour nous comme militants ou sympathisants de la gauche française,de nous demander quelle aide et quelle contribution nous pouvons apporter au peuple grec.
En premier lieu,avant d'attaquer ou de remettre en cause la politique de Syriza et du gouvernement grec,nous devons clairement identifier les auteurs et la nature du coup de force mené contre le peuple grec dans ces négociations qui ont été un traquenard.
Comme militants français,nous devons établir et dire la vérité,celle de l'engagement total de notre gouvernement,des Hollande et Moscovici,dans l'ignoble chantage auquel a été soumis la délégation grecque.
Dire la vérité,c'est aussi dire que notre gouvernement,celui du 49ter et de la Loi Macron,se situe dans le camp de ceux qui disent aux dirigeants grecs qu'ils doivent aller jusqu'au bout de la capitulation,aller jusqu'au bout de l'application des réformes,quel qu'en soit le prix pour le peuple grec,quelles que soient les souffrances et le martyr déjà infligés à tout un peuple.
Chacun se souvient que M Mélenchon avait demandé a être reçu par Hollande pour que celui-ci « fasse entendre la voix de la France »,chacun se souvient que Pierre Laurent en avait appelé à la BCE et aux institutions européennes pour qu'elles s'engagent dans la voie d' « une Europe plus juste et solidaire.. ».
Le verdict est tombé,la « voix de la France s'est mêlée aux ordres aboyés par Schauble et les « institutions européennes »,sans fard et sans masque ont montré leur vrai visage,celui de la dictature du capital financier,faisant mettre un genou à terre aux représentants d'un gouvernement démocratiquement élu.
Il est des défaites qui sont plus honorables que bien des victoires et tout le déshonneur et l'infamie de cette signature extorquée à des hommes qui avaient un pistolet sur la tempe,retombe sur ces dirigeants qui veulent précipiter la Grèce dans l'abîme de misère où ils veulent faire plonger leur propre peuple.
Le lendemain de ce jour de honte,la presse bourgeoise se réjouissait sans vergogne de la « capitulation » de Syriza,pendant qu'à l'unisson Hollande,Paul Laurent ou Mélenchon saluaient la victoire de la démocratie.
Beaucoup de questions restent posées,toutes les questions restent posées et certaines inquiétudes commencent à être exprimées,le carnage annoncé,le festin des capitalistes et des banquiers semble encore soumis à quelques conditions ?
En premier lieu,jusqu'où Tsipras et Varouflakis sont-ils prêts à aller dans la voie qui leur est ouverte par Merkel et Hollande ? Aucune réponse certaine à cette question et la rupture reste possible à tout moment,parce qu'aller jusqu'au bout de l'écrasement de son propre peuple,piétiner tous les espoirs et toutes les attentes de ceux qui vous ont élus,il faut avoir les « qualités morales «  d'un Valls ou d'un Cambadélis pour assumer ce choix.
Une autre question posée est celle de la réaction des militants et des dirigeants de Syriza qui ne se pose pas en terme d'opposition à Tsipras ou de remise en cause de sa légitimité.
Ce que disent les militants,ce n'est pas « Tsipras nous a trahis . » .Ce que disent les militants,c'est qu'ils doivent aider ce gouvernement à résister à ces bandits de la Troïka,qu'ils doivent mettre tout leur poids dans la balance,y compris par la mobilisation populaire,pour barrer la voie au retour des pillards.
Des millions de travailleurs grecs sont prêts à descendre dans la rue,mais pas contre le gouvernement qu'ils voient encore comme leur gouvernement.
Les dernières déclarations des dirigeants de la CDU,l'exigence renouvelée avec tant de hargne que le Mémorandum soit appliqué jusqu'au bout et dans sa totalité,ce déchaînement brutal d'une haine de classe dirigée contre tout un peuple,tout cela est repris et commenté par la presse grecque et discuté avec gravité par toute la population et chacun en tire les conclusions d'un affrontement inévitable.
Le calcul de ces voyous politiques était d'obtenir la capitulation de Syriza pour barrer la voie à toute issue politique,ils n'ont pas fait la moitié du chemin dans cette voie,ils ont au contraire crée les conditions d'un surgissement révolutionnaire d'un soulèvement de tout un peuple.
N'en déplaise à MM Laurent ou Mélenchon,quand le peuple descendra dans les rues d'Athènes il est probable que nous verrons brûler beaucoup de drapeaux de l'Union européenne et que les mots d'ordre qui souderont les cortèges ne seront pas ceux de l'humanisation de la BCE ou de l'exigence d'une Europe plus sociale adressée à ...Merkel et Hollande,mais plus prosaïquement :
A bas l'Union Européenne !
A bas la Troïka !
Quand un peuple combat pour sa survie,certaines vérités essentielles s'imposent à lui.
Ce 9 Mars 2015,les confédérations CGT,CGT-FO et Solidaires appelent à une journée de grève interprofessionnelle et de manifestations,contre les politiques d'austérité,contre la Loi Macron.
Déjà dans de nombreux départements les UD Cgt et Fo lancent des appels communs à la grève et à la manifestation,un mouvement de fond est engagé dans la voie de la résistance,pour bloquer la politique du gouvernement.
Athènes ou Paris,une même alternative,accepter les Réformes ou les combattre,résister ou sombrer .




Kostas Lapavitsas est professeur d’économie à l’Université de Londres et a été élu député Syriza lors des dernières élections. Dans un article publié sur son blog le 23 février, il critique les dernières négociations de son gouvernement avec les créanciers du pays et considère que cela ne va pas dans le sens des engagements pris lors du discours de Thessalonique qui présentait le programme économique en cas de victoire. Il pose également 5 questions importantes sur la dette, l’austérité, le Plan national de reconstruction et l’avenir des négociations.


La contribution de Kostas Lapavitsas
L’accord de l’Eurogroupe n’est pas complété, en partie parce que nous ne savons pas encore quelles sont les ‘réformes’ que le gouvernement grec proposera aujourd’hui (lundi 23 février) et quelles sont celles qui seront acceptées.
Mais, nous qui avons été élus sur la base du programme de Syriza et qui considérons que les propositions de Thessalonique sont un engagement que nous avons pris envers le peuple grec, nous sommes profondément préoccupés. Et il est de notre devoir de consigner nos préoccupations.
Le contour général de l’accord est le suivant :
  1. La Grèce demande la prorogation de l’accord courant qui est fondé sur une série d’engagements.
  2. Le but de la prorogation est de permettre d’achever l’évaluation de l’accord courant et de donner le temps d’élaborer un nouvel accord probable  ;
  3. La Grèce soumettra immédiatement une liste de ‘réformes’ qui seront évaluées par les ‘institutions’ et sur lesquelles un accord sera conclu au mois d’avril. Si l’évaluation est positive, les fonds qui n’ont pas encore été donnés au titre de l’accord courant seront dégagés, de même que seront restitués les bénéfices réalisés par la BCE ;
  4. Les fonds disponibles au Fonds de stabilité financière (ESF) serviront exclusivement à couvrir les besoins des banques et ne seront plus sous contrôle grec.
  5. La Grèce s’engage de remplir pleinement et en temps utile toutes ses obligations financières envers ses partenaires.
  6. La Grèce s’engage à assurer les excédents ‘adéquats’ afin de garantir la viabilité de la dette sur la base des résolutions de l’Eurogroupe de novembre 2012. L’excédent 2015 tiendra compte de la conjoncture économique de 2015.
  7. La Grèce ne révoquera pas de mesures, ne procédera pas à de changements unilatéraux susceptibles d’avoir un effet négatif sur les objectifs budgétaires, la reprise économique ou la stabilité financière tels qu’évalués par les ‘institutions’.
Sur cette base, l’Eurogroupe entamera les procédures nationales en vue d’une prorogation de quatre mois de l’accord en cours et invite les autorités grecques à engager immédiatement la procédure en vue de la réalisation de son évaluation.
Il est difficile de discerner comment, au travers de cet accord, il sera possible de réaliser les mesures annoncées à Thessalonique qui incluent l’annulation de la majorité de la dette et le remplacement immédiat des mémorandums par le Plan national de reconstruction.
Nous qui avons été élus avec Syriza, nous nous sommes engagés pour la réalisation de ce Plan indépendamment des négociations concernant la dette car nous estimons nécessaire de relancer l’économie et de soulager les souffrances de la société. Il est donc nécessaire à présent d’expliquer comment cela sera réalisé et comment le nouveau gouvernement sera en mesure de changer la situation tragique dont il a hérité.


Pour être plus précis, le Plan national de reconstruction incluait quatre piliers représentant, pour la première année, le coût suivant :
  1. Lutte contre la crise humanitaire (1,9 milliards).
  2. Relance de l’économie par le biais d’allègements fiscaux, le remaniement des ‘prêts au rouge’, la création d’une banque de développement, la restauration du salaire minimum à la somme de 751 euros (total : 6,6 milliards).
  3. Plan pour l’emploi public, impliquant 300.000 emplois (3 milliards pour la première année et 2 autres milliards à la seconde).
  4. Changement du système politique par le biais d’interventions dans les collectivités locales et au Parlement.
Les sources de financement prévues pour la première année, étaient les suivantes :
  1. Liquidation des dettes envers le fisc (3 milliards)
  2. Lutte contre l’évasion fiscale et le trafic de marchandises (3 milliards)
  3. Fonds de stabilité financière (3 milliards)
  4. Cadre national stratégique pour le développement et autres programmes communautaires (3 milliards)
Compte tenu de la communication de l’Eurogroupe, je pose les questions suivantes :

Plan national de reconstruction

Comment le Plan national de reconstruction sera-t-il financé si les 3 milliards du Fonds de stabilité financière sont dorénavant hors du contrôle grec ? Ces fonds n’étant plus disponibles, il sera d’autant plus impérieux de collecter des sommes importantes grâce à la lutte contre l’évasion fiscale et à la liquidation des dettes envers le fisc, dans un très bref délai. Combien cette perspective est-elle réalisable ?

Annulation de la dette

Comment l’annulation de la dette pourra-t-elle avancer si la Grèce s’engage à rembourser intégralement et en temps utile toutes ses obligations financières envers ses partenaires ?

Levée de l’austérité

Comment pourra-t-il y avoir une levée de l’austérité si la Grèce s’engage de réaliser des excédents primaires ‘adéquats’ afin de rendre ‘viable’ l’énorme dette courante ? La ‘viabilité’ de la dette –telle qu’estimée par la troïka – était précisément la raison de la chasse absurde aux excédents primaires. Étant donné que la dette ne sera pas significativement réduite, comment arrêterons-nous d’avoir des excédents primaires qui sont catastrophiques pour l’économie grecque et qui constituent l’essence de l’austérité ?

Surveillance et coût budgétaire

Comment sera-t-il possible de réaliser des changements progressistes dans le pays si les ‘institutions’ exercent une surveillance stricte et interdisent les actions unilatérales ? Les ‘institutions’ permettront-elles de réaliser les piliers du programme de Thessalonique étant donné qu’ils ont un impact budgétaire direct ou indirect ?

La négociation future

Qu’est-ce qui aura précisément changé dans les quatre mois de la ‘prorogation’ pour que la nouvelle négociation avec nos partenaires ait lieu à partir de nouvelles positions meilleures ? Qu’est-ce qui évitera la dégradation de la situation politique, économique et sociale du pays ?
Les moments sont absolument cruciaux pour la société, la nation et, bien entendu, pour la Gauche. La légitimité démocratique du gouvernement est fondée sur le programme de Syriza. La moindre des choses est d’avoir un débat ouvert dans les organes du parti et dans le groupe parlementaire. Nous devons fournir immédiatement des réponses pertinentes à ces questions pour conserver le soutien et la dynamique que le peuple grec nous imprime. Les réponses qui seront données dans les jours qui suivent jugeront de l’avenir du pays et de la société.
Source : OkeaNews, repris et traduit depuis le blog de K. Lapavistas, le 23 février 2015

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